Jean-François Kervéan dans la cour pavée de l’Hôtel du Croissant où était organisé le Salon du livre, dimanche 4 décembre (photo J.-L. G.).
L’écrivain beaumontois est revenu chez lui pour présenter deux romans historiques au Salon du livre : « Animarex » et « La naissance du sentiment ». L'action du second se situe cinq siècles avant J.C., et son récit s’inspire de l’Oise et de ses berges.
Au fond de la grande salle de l’Hôtel du Croissant, Jean-François Kervéan est entouré discrètement par sa mère et sa sœur Sophie, qui tient de longue date la crêperie La Tulipe, rue de Senlis. « Je suis arrivé à Beaumont en 1978, j’avais 15 ans, mes parents y habitent toujours, raconte-t-il. J’y reviens régulièrement. » Dimanche 4 décembre, l’écrivain, journaliste, chroniqueur culture et critique littéraire à la télévision, est revenu à Beaumont comme invité d’honneur de la 3e édition du Salon du livre organisé par le Cercle beaumontois du patrimoine et Corinne Lesclingand-Drouet.
Jean-François Kervéan est entré sans frapper dans le monde de la littérature. Pensez donc, ses deux premiers livres ont été primés ! Prix du Premier roman en 1994 pour « La Folie du moment » et prix du Renaudot des lycéens en 1996 avec « L’Ode à la reine ». Moins parce qu’il y a prescription, vingt-deux ans après, que pour son aversion à la langue de bois, il avoue : « J’ai eu le Renaudot des lycéens parce que mon éditeur, à l’époque, entretenaient de très bonnes relations avec le jury. Savoir cela aide à se consoler quand on ne l’a pas et à ne pas sauter au plafond quand on l’a. C’est moins vrai aujourd’hui. Bernard Pivot a contribué à nettoyer tout ça. » Avec cet autre aveu, il bâillonne à nouveau son propre égo : « Comme c’était très difficile d’en vivre, je suis allé vers une activité plus rentable. J’ai cédé à l’argent. Je suis devenu le ‘’nègre’’ de Loana, Nabila, Michel Drucker, Hervé Vilard. »
Beaumont est un faubourg
de Sparte et l’Oise est l’Eurotas
En 2015, avec « Animarex » (Robert Laffont) qui raconte l’amour de jeunesse de Louis XIV, il renoue avec sa « première » carrière. Quelques exemplaires de l’ouvrage l’accompagnaient dans les murs de cet Hôtel du Croissant, à Beaumont, qui justement reçut le « Roi Soleil » le 13 juillet 1680. Prolifique, Jean-François Kervéan a écrit en six mois, cette année, « La naissance du sentiment » (Robert Laffont), dont l’histoire se situe au Ve siècle avant J.-C. « Avec ces deux romans historiques, épiques, je suis revenu à mes amours. J’ai une grande passion pour l’Histoire, j’aime inventer dans l’Histoire. ‘’La naissance du sentiment’’, je l’ai écrit à Beaumont. Les soirs d’été, pour faire les corrections, je descendais sur les berges de l’Oise, à l’endroit de l’ancienne plage, où les arbres sont magnifiques… »
Le dernier chapitre s’appelle « Par la Porte des Cygnes et des Castors ». Les cygnes qui s’approchent du visiteur pour quémander un morceau de pain, les ragondins qui font un peu d’exercice après une chaude journée passées dans l’eau, surgissent dans les pages du livre… Beaumont devient Kynosoura, faubourg de Sparte, au bord du fleuve. L’Oise est l’Eurotas où se tient la Rhêtra, l’assemblée qui doit décider de faire ou non la guerre aux Perses. « Dans toute la Grèce, on n’aurait pu trouver une berge plus paisible, mieux arborée, plantée de saules frôlant l’eau, d’acacias centenaires… ». Ceux sous lesquels son roman avançait à grands pas. « Un site enchanteur », lit-on aussi. Au point que l’écrivain estime que « voter la guerre dans cet écrin semblerait une aberration ». En face, la rive persanaise présente « une aire moins avenante ».
« Avec Loana et Nabila, je suis
entré dans le monde moderne »
« Dans ce métier, c’est dur de rester longtemps assis, nous dit-il, sans sourciller. Je passe jusqu’à dix heures devant l’ordinateur. Je me lève avec mon livre, je me couche avec lui. Le livre est tout dans votre tête. Au début, vous guidez vos personnages puis vous les suivez… »
Changeons totalement de registre. Lui-même a suivi… Loana et Nabila en réalisant leur biographie. « Avec elles je suis entré dans le monde moderne. Elles sont connectées mais elles ne savent rien. Nabila m’a appris les réseaux sociaux. Tout le monde dit que ce sont des connes mais, en fait, elles sont profilées pour le 21e siècle. Nabila n’est pas concernée au-delà de son monde. Comme son père est algérien, j’ai essayé de lui parler de son pays d’origine, mais elle se fiche complètement de ce qui se passe de l’autre côté de la Méditerranée. Un égoïsme tout puissant. » De la télé-réalité à la réalité de la télé avec Michel Drucker, le livre « Mais qu’est-ce qu’on va faire de toi ? » revisite la réussite et la longévité du présentateur et ex-cancre. « Michel respecte le public, il est dans un système avec des valeurs, explique Jean-François Kervéan. Il vous considère de la même manière, que vous êtes ministre ou concierge. » Ou même spartiate...